Les principaux ingrédients de la cuisine chinoise
par Henri LECOURT (Edition Albert Nachbaur, Pékin, 1925, XII+150 pages).
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Jeune homme en costume d’été
Bien des produits employés n’ont pas leur équivalent en Français et il est souvent impossible de les identifier à cause de l’absence d’une terminologie bien établie. Un petit dictionÂnaire spécial ne serait pas déplacé mais en allongeant singuÂlièrement ce travail il le rendrait indigeste, ce qui, pour un livre de cuisine ne serait pas une recommandation. De nomÂbreux renvois accompagnent le texte les indications qu’ils donÂnent seront suffisantes pour guider.
Sauf indication contraire, la viande employée est toujours le porc frais, les mahométans, nombreux en Chine, le remplacent par le mouton. Depuis quelques années les Chinois mangent aussi du bœuf. Le beurre est totalement inconnu on le remplace par divers corps gras, graisse du mouton et surtout du cochon, l’huile de sésame [1] l’huile d’arachides [2]. Le vinaigre chinois est obtenu par l’acidification de l’alcool de grains, il est beaucoup moins acide que le nôtre. Un produit universellement employé dans l’alimentation des Célestes est le soya [3] ou fromage de haricots présentant un aspect analogue à notre fromage blanc. Il se fabrique avec une espèce particulière de pois oléagineux et selon qu’il est travaillé on en fait des sauces, des condiments, des sucreries.
Certains produits ont leurs similaires chez nous tels que moutarde, sel, poivre, on substitue souvent à ce dernier des graines pulvérisés qu’on appelle ‘hoa tsiao’ [4] moins irriÂtantes que le poivre.
Les condiments employés sont nombreux, outre ceux qui viennent d’être énumérés il faut ajouter le piment qui accomÂpagne de nombreuses sauces. On le fait frire dans l’huile de sésame à laquelle il communique sa saveur et son goût, particuliers [5]. Les ‘hien ts’ai’ [6] sont composés de céleri, de petits cornichons, de petits haricots en cosse marinés au sel ce qui leur vaut ce nom de légumes salés.
Le Chinois ajoute à ses sauces, à ses bouillons quelques feuilles d’une sorte de persil à odeur très accentuée tenant le milieu entre le persil et la pimprenelle, on l’appelle pour cette raison ‘hiang ts’ai’ [7] l’herbe parfumée. L’ail domine dans certains plats de haut goût, puis vient la fameuse ciboule chinoise [8], assaisonnement préféré du « populo », dont l’odeur est autrement violente que celle de l’ail, et d’une persistance remarquable. Qui n’a pas tiqué aux douces émanations d’un « pousse » venant de se régaler de son mets favori ? On peut suivre le sillage parfumé qu’il laisse traîner derrière lui. On emploie beaucoup le gingembre[9], l’anis[10], etc.
Ce que nous traduisons par « vin » n’est pas du vin comme nous l’entendons. Le vin chinois « tsieou » est un alcool obtenu par distillation de certains grains, riz, millet sorgho, au moyen d’un alambic rudimentaire d’où un goût empyreumatique quelquefois très prononcé et très désagréable. Dans les recettes qui suivent on peut toujours le remplacer par du cognac. Les alcools chinois sont nombreux, celui qu’on utilise à la cuisine est le « hoangtsieou » ou « lao tsieou » [11] vin jaune ou vin vieux.
[1] huile de sésame ou de chènevis (chanvre ou canabis), mat cheu yeou est aussi appelée hiang yeou
[2] huile d’arachides, hoa cheng yeou
[3] Soya, teou fou (tofu)
[4] hoa tsiao (fragraria horrida, Th)
[5] huile au piment la tseu yeou (expression correcte la tsiao yeou)
[6] Légumes salés, Hien ts’ai
[7] herbe parfumée, hiang ts’ai, espèce de basilic ou de Cataire (herbe aux chats)
[8] Ciboule chinoise kieou ts’ai
[9] Gingembre, Â kiang
[10] Anis étoilé hoei hiang
[11] Alcool hoang tsieou lao tsieou, vin jaune vin vieux

